Voici 2 ans maintenant que Hakob Ghasabian, un jeune élève violoniste inscrit en CHAM au Conservatoire à Rayonnement Régional de Lille m’a sollicitée pour l’accompagner dans l’aventure « Prodiges », émission consacrée aux jeunes talents du classique, instrument, voix et danse, retransmise aux heures de grande écoute pendant la semaine de Noël sur France 2 et plus récemment le 2 juin 2017 en direct du stade Pierre Maurois de Lille. Je ne vous ferai pas l’historique de l’émission. Ce qui m’importe aujourd’hui dans cette communication c’est de vous relater de l’intérieur l’expérience de cet accompagnement.
Un article à paraître dans la prochaine revue de l’AFPC-EVTA France à l’occasion de nos journées pédagogiques annuelles en retrace dans le détail le déroulement. Je ne développerai donc pas ici et après la captation à Strasbourg du 4è volet de cette émission, je souhaite résumer l’essentiel de cette expérience en quelques lignes.
Fréquenter de l’intérieur ce monde de la télévision m’a une fois de plus démontré à quel point chaque corps de métier reste campé dans ses façons de faire et ses impératifs de rentabilité. Oser imaginer et chambouler les paramètres établis et éprouvés n’est donné qu’à quelques pionniers qui ont tenté la différence. Ils ont fait école ensuite. Comme dans toute entreprise, les enjeux financiers sont le fer de lance et là, les moyens sont tels que je comprends que les revendications de professeurs inquiets pour le devenir de leurs élèves paraissent bien petites. Chacun campe sur ses certitudes et ses peurs et dans l’aventure, il reste des enfants pourtant âgés d’un minimum de 8 ans à qui l’on parle comme à des enfants de maternelle tout en leur demandant d’assumer des pièces d’adultes. Ils sont vraiment Prodiges pour sortir vainqueurs ou tout au moins préservés de ce genre de défi !
Quelles peurs et quelles envies derrière tout cela ? L’appât du gain pour tous les travailleurs de la production, juste gagner sa vie en faisant son job, l’appât de la célébrité ou de la paternité de la célébrité pour les enfants et parents sans autre rétribution qu’une prise en charge d’un seul parent et du rejeton pendant la durée des sélections et finales, la mise en lumière d’un travail pour les professeurs ?
Pour toute l’équipe qui œuvre dans l’ombre, pas de soucis, ils font très bien leur boulot, avec attention et professionnalisme, pour les parents et enfants ils sont bien souvent très démunis quand ils ne connaissent pas le milieu artistique. Pour les chanteurs, parfois débutants, ils sont même désemparés car laissés là dans les couloirs sans autre aide pour leurs enfants qu’un pianiste pas toujours formé à la discipline particulière du « chef de chant ». Parfois, un professeur accompagne comme j’ai pu le faire et se retrouve à faire l’échauffement de tous les chanteurs entre deux portes, entre deux essayages ou interviews, autant dire juste les rassurer et glisser quelques conseils pour affronter l’inconnu.
Alors questions, pour ou contre ? Cela existerait de toute façon. Ignorer alors, difficile quand un de vos élèves se retrouvé embarqué dans l’aventure sans vous avoir demandé votre avis. Enrichissant certes, alors jusqu’à quel point ?
Ne peuvent-ils se doter d’un véritable directeur artistique spécialisé dans chaque catégorie. Cela coûterait-il si cher de se mettre d’accord sur des œuvres accessibles, facilement arrangeables pour ces jeunes de 8 à 16 ans si enthousiastes à l’idée de partager leur émerveillement de la musique et de la danse ? Comme disait le parent d’un des derniers participants, peut-être juste une rampe de moins dans l’arsenal de lumières.
À suivre.